Lass
Alhassane Konté, alias Lass, est un peintre et sculpteur malien dont le travail explore avec sensibilité les liens entre l’homme, la nature et la mémoire. Né en 1993 à Kodié, un village soninké de la région de Kayes, il grandit dans un environnement où la terre et les éléments façonnent le quotidien. Son enfance, rythmée par la garde des troupeaux aux côtés de sa mère, forge un rapport intime avec la nature, un ancrage qui imprégnera durablement son approche artistique.
Mais son enfance est aussi marquée par une rupture brutale : la perte de sa mère alors qu’il n’a que sept ans. Cet événement douloureux le confronte prématurément aux réalités du monde adulte, tout en renforçant son attachement à la mémoire et à l’enfance. Cette dualité entre insouciance et épreuve se retrouve au cœur de son œuvre. L’enfance n’y est pas seulement un thème récurrent, elle devient une source d’énergie, un espace de résistance face aux dures réalités du monde adulte. Pour Lass, "tout changement commence par les enfants" : ils portent l’espoir d’un monde réconcilié avec la nature, d’un équilibre possible entre modernité et racines. Ses toiles sont peuplées de silhouettes juvéniles baignées de lumière, évoluant dans des paysages vastes et silencieux, loin de l’agitation urbaine. Ces figures dialoguent avec des animaux, protègent des fleurs fragiles, s’abandonnent à la contemplation. Elles semblent suspendues dans un temps indéfini, comme en quête d’un paradis perdu.
Ce lien intime entre enfance et nature se traduit aussi par le choix des matières. Lass intègre dans ses œuvres des copeaux et de la sciure de bois récupérés dans des ateliers de menuiserie, leur offrant ainsi une seconde vie. Ce geste, à la fois artistique et écologique, témoigne d’un grand respect pour la matière et d’une volonté de réenchanter ce qui semble voué à l’oubli. Grâce à cette approche, ses œuvres dégagent une présence tactile et organique. Entre abstraction et figuration, il développe un langage visuel empreint de douceur et de poésie. Ses formes flottent, impalpables, comme des fragments de souvenirs qui resurgissent du passé.
Avant de se consacrer pleinement à l’art, Lass suit d’abord des études en comptabilité. Rapidement, il comprend que son véritable langage est ailleurs. Il intègre l’Institut National des Arts de Bamako, où il se forme à la sculpture, puis poursuit son apprentissage au Conservatoire des Arts et Métiers Multimédia Balla Fasséké Kouyaté. Là, il affine son langage plastique et expérimente diverses techniques, mêlant peinture, sculpture et arts numériques. Influencé par des figures majeures comme Amadou Sanogo, Soly Cissé ou Barthélémy Toguo, il forge une pratique entre figuration et abstraction, où chaque œuvre devient un espace de dialogue entre passé et présent, réalité et rêve.
Depuis 2018, son travail rayonne bien au-delà du Mali. Lauréat du concours de la coopération Mali/Union Européenne, il expose au Musée National du Mali et rejoint le collectif Tim’Arts, où il trouve un cadre propice à l’échange et à l’expérimentation. En 2019, sa première exposition personnelle, MicroMéga, à la Villa Soudan à Bamako, marque un tournant. Dès lors, il enchaîne les expositions en Afrique et à l’international : en France (Galerie Chauvy, Paris), en Côte d’Ivoire (LouiSimone Guirandou Gallery, Abidjan), au Sénégal (Galerie Mémoires Africaines, Saly), au Maroc (Centre Montevideo, Marrakech) et en Suisse (Ilan Design, Genève). En 2023, il dévoile Le Paradis Retrouvé au Jaal Riad Resort à Marrakech, une série où l’enfance devient refuge, promesse d’un monde réinventé.
Parallèlement, il multiplie les résidences artistiques, notamment à la Fondation Blachère et au Congo-Brazzaville, enrichissant sans cesse son vocabulaire plastique. Aujourd’hui, Lass poursuit inlassablement son exploration de la mémoire et de l’identité, cherchant à capter cette lumière fragile qui relie l’homme à la nature, l’individu à son histoire.
